Ce guide a pour objet de poser un cadre de travail juste et équilibré entre scénaristes et réalisateur·rice·s. Bien qu’il soit essentiel de l’envisager le plus rapidement possible avec une société de production, il peut se passer un long moment avant la première signature contractuelle. Situation pas inhabituelle lors du délicat passage du court au long. En attendant, scénaristes et réalisateur·rice·s doivent apprendre à encadrer eux-mêmes leur relation professionnelle en amont afin de se concentrer en toute confiance sur leur travail d’écriture.
Nous avons voulu ce guide, clair, précis et équitable dans sa prise en compte des préoccupations de chaque partie. Cela ne le rend pas forcément des plus ludiques, soyons francs. Nous avons veillé à éviter le plus possible les circonvolutions parajuridiques dignes d’un constat d’assurance, promis. Néanmoins, puisqu’il s’attache à envisager les différentes évolutions possibles d’une telle relation, il nous a été impossible d’insister à chaque ligne sur la conviction partagée qui a guidé la conception du guide : la co-écriture peut être une richesse pour chacun et, plus largement, pour les films qu’elle aide à faire naître. Certes, la co-écriture n’est en rien indispensable. Beaucoup de réalisateur·rice·s écrivent seul·e·s ou s’appuient sur les regards ponctuels de consultant·e·s, sur leurs échanges avec leur producteur·rice. Mais quand elle advient, elle peut être un atout précieux qui alimente la première étincelle, le premier désir du·de la réalisateur·rice pour en faire un feu nourri.
Elle prend soin de ce premier enthousiasme pour le rendre communicatif sans le dénaturer. Elle ébranle puis enracine des convictions très fortes sur le monde et les personnages qu’elle fait naître. Elle ouvre des portes, allume des contrechamps dans le récit. Durant une longue période, réalisateur·rice·s et scénaristes cherchent ensemble, tricotent longuement et, en définitive, l’enjeu est de parvenir à des idées qui proviennent des deux co-auteur·rice·s, mais que le·la réalisateur·rice sera à même de porter seul·e jusqu’au tournage, puis au montage, de manière à réaliser « son » film. Au-delà de l’intrigue et de la dramaturgie, le scénario articule déjà des envies thématiques et des désirs de mise en scène. Aussi, lorsque nous cheminons ensemble, scénaristes et réalisateur·rice·s, nous nous attachons à « rêver » tout un film, et pas seulement son intrigue.
Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière ; François Truffaut et Jean Gruault ; Billy Wilder et I.A.L. Diamond ; Agnès de Sacy, Noémie Lvovsky et Valeria Bruni Tedeschi ; Odile Barski et Claude Chabrol ; Christine Laurent, Pascal Bonitzer et Jacques Rivette… Pour les rédacteurs et rédactrices de ce guide, ces collaborations au long cours sont des horizons enviables. Quoi de mieux que de se redécouvrir de film en film, de se faire de plus en plus confiance tout en essayant de se surprendre à chaque fois un peu plus, un peu mieux ?
En cela, le SCA (les Scénaristes de Cinéma Associés) et la SRF (Société des Réalisatrices et réalisateurs de Films) ont élaboré ce guide à ambition aussi modeste qu’essentielle : celle de permettre aux plus beaux aspects de ce travail précieux en commun, fait d’entente artistique et d’imaginaire partagé, d’advenir.
À l’initiative de ce guide et/ou à sa rédaction :
Yacine Badday, Jamal Belmahi, Cyril Brody, Khalil Cherti, Chloé Duval, Sarah Lasry,
Pierre Le Gall, Valerie Leroy, Jonathan Millet, Sylvain Pioutaz, Sophie Tavert Macian, Zoé Wittock.
Bonne lecture !
Ce guide sera présenté aux Journées du Scénario le 4 avril.