Enquête auprès des adhérentes et adhérents des Scénaristes de Cinéma Associés
Le groupe VMSS (violences morales sexistes et sexuelles) a sollicité en octobre 2024 les adhérent·e·s du SCA pour répondre à un questionnaire anonyme concernant l'ampleur des violences vécues et subies par les scénaristes dans le cadre de leur travail.
Grâce aux réponses reçues, nous avons pu signaler la gravité de la situation à la commission d'enquête parlementaire qui a auditionné le SCA le 21 novembre 2024 en livrant les premiers résultats chiffrés de ce questionnaire.
Vous trouverez en pièce jointe l'analyse approfondie de ces éléments et le détail des mesures proposées par le SCA pour informer, prévenir et lutter contre ces violences.
Cette analyse a été transmise à la Commission d'enquête parlementaire présidée par Sandrine Rousseau, ainsi qu'au ministère de la culture et de la communication et au CNC.
Nous remercions les participant·e·s pour leur confiance et leurs réponses, nombreuses et détaillées, qui nous ont permis de lever le voile sur des violences endémiques et d'élaborer des mesures pour y répondre.
Les dix préconisations du SCA sont les suivantes :
1. La montée en puissance de la cellule Audiens. Son élargissement au harcèlement moral et discriminatoire. Une meilleure communication envers les artistes-auteurs, qui ignorent souvent y avoir droit. Un étoffement de son dispositif d’aide psychologique et juridique : aide juridictionnelle, prise en charge psychologique à long terme, suivi médical et aides sociales, comme souhaité par le CNC lors de son audition par la Commission d’Enquête Parlementaire, pour les victimes, statut d’artiste-auteur compris. La Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs pourrait y être associée.
2. La mise en place de modules conséquents d’information, de formation et de prévention en matière de VMSS au sein des écoles de cinéma. Là encore, le SCA souhaite voir se concrétiser cette disposition suggérée également par le CNC qui, comme déclaré par M. Olivier Henrard lors de son audition par la commission d’enquête parlementaire, “dispose d’un certain nombre de leviers sur les écoles [et] fera le nécessaire pour que ces modules soient mis en place.” Le SCA rappelle la nécessité d’y intégrer les étudiant.e.s scénaristes et au-delà des VSS, le harcèlement moral et discriminatoire.
3. L’intégration des scénaristes dans les dispositifs de formation obligatoire par le CNC, autrement dit l’extension de l’obligation de formation pour toutes les équipes de tournage, mesure entrant en vigueur dans le cinéma au 1er janvier 2025, aux scénaristes. Les dispositifs de formation sont vertueux et permettent aux scénaristes d’identifier les types de violences et de connaître les outils et recours qui sont à leur disposition. Jusqu’à présent, la formation des scénaristes aux VMSS est prise en charge par l’Afdas et repose sur leur bon vouloir.
4. L’introduction d’une clause VMSS dans les contrats d’auteurs. Rien n’interdit aux sociétés de production d’élargir la prévention et le signalement des VMSS au-delà des salarié.e.s de la production, et donc d’intégrer les travailleurs/euses indépendant.e.s comme les scénaristes. C’est faire mieux que le minimum légal. Devant la Commission d’Enquête Parlementaire, Leslie Thomas, secrétaire générale du CNC, a employé par exemple le terme de « collectif de travail » du producteur. Nous en faisons partie. Cela donnerait droit aux scénaristes de contacter le référent VMSS de la production par exemple, et de bénéficier du dispositif de signalement et d’enquête mis en place par la production. Nous demandons donc aux productions d’intégrer les scénaristes dans leur plan de prévention des VMSS, dès le début de l’écriture. Une clause VMSS intégrée dans les contrats d’auteurs permettrait de le stipuler. Sans que les scénaristes changent de statut, ni qu’il y ait besoin de signer un autre type de contrat. La rédaction d’une telle clause devrait se faire en bonne intelligence avec les syndicats de producteurs/trices. Nous demandons aussi l’intégration d’une clause VMSS d’ordre déontologique dans les contrats d’auteurs, posant un engagement moral des deux parties de lutte contre les VMSS. Cette clause pourrait également voir préciser certaines modalités des conditions de travail des scénaristes par exemple en listant les lieux de travail que le scénariste refuse (chambre d’hôtel, lieu privé), ou des plages horaires de mise en contact/ de communication (ce qui n’est pas un encadrement des horaires de travail) qui excluraient le week-end et la nuit par exemple.
5. La mise en place d’un dispositif de recueil de signalements et d’enquête par un organisme indépendant, notamment parce que les producteurs/trices peuvent faire partie des personnes mises en cause. En cela, le SCA salue et soutient la piste envisagée par le CNC, concernant l’élargissement des missions et des attributions du CCHSCT. Olivier Henrard, lors de son audition par la Commission d’enquête parlementaire : « Son rôle est central. Il devrait disposer d’un vrai pouvoir d’enquête, de vrais préventeurs santé et travail spécifiques à ses questions et des personnes ressources pour accompagner les salariés des employeurs lorsque des cas de violence adviennent. » Au-delà des salariés, les travailleurs indépendants et les scénaristes devraient être intégrés à ce dispositif.
6. Nous demandons aux résidences d’écriture et à leurs tutelles de prendre conscience de la gravité des faits qui ont été portés à notre connaissance, de se doter de toute urgence et de façon systématique de référent.e VMSS et de processus de prévention et de lutte contre les VMSS.
7. Être scénariste hors contrat est un facteur de risque supplémentaire. Nous demandons aux productions de faire en sorte que les contrats d’auteurs soient établis le plus tôt possible.
8. Nous demandons aux productions de régler les échéances dues aux auteurs sans délai et spontanément.
9. Parler ne devrait jamais être un problème et témoigner ne devrait pas entraîner de conséquences professionnelles négatives. Nous demandons aux productions et à l'ensemble des collectifs de travail de respecter la parole des auteurs.trices qui témoignent de violence sexistes et sexuelles et de s'abstenir de tout préjugé négatif ou de comportements discriminatoires ultérieurs à leur égard.
10. En tant qu’organisation professionnelle, le SCA est partie prenante de cette lutte. Au-delà de la mise en ligne progressive de ressources et informations à destination des adhérent.e.s sur le site de l’association, des adhérentes ont été formées les 16 et 17 décembre 2024 pour être référentes VMSS au sein de l’association et ainsi recueillir la parole d'éventuelles victimes. Nous souhaitons qu’ensuite ces victimes puissent être orientées par le SCA vers des institutions partenaires qui pourraient prendre le relais de leur accompagnement, grâce à un soutien humain et financier : CNC, CCHSCT, SACD, Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs.