Le 4 janvier 2017, nous étions une vingtaine à nous réunir au premier étage de l’Autre Café, à Paris. C’était la première pierre de ce qui allait devenir le SCA- scénaristes de cinéma associés. Certain.e.s d’entre nous venaient de quitter la Guilde des Scénaristes, d’autres n’avaient jamais fait partie d’aucune association professionnelle, mais nous avions toute et tous suffisamment de choses en commun pour avoir envie de créer, ensemble, un espace. Un espace de liberté. Un espace de rencontre. Un espace de pensée.
Aujourd’hui, plus d’un an plus tard, nous voilà trois fois plus nombreux, et structurés en association. Nous voilà avec un site internet. Nous voilà membres de nombreuses organisations collectives. Nous voilà avec des projets, et toujours cette amitié qui nous permet de nous écouter, de nous parler, d’imaginer ensemble. Nous nous sommes choisi un nom qui correspond à nos ambitions : scénaristes de cinéma associés. Pluralité des singularités. Diversité. Echanges. Union. Et le cinéma comme passion commune.
Et comme les valeurs ne s’usent que si l’on ne s’en sert pas, nous avons décidé que toutes les réunions du conseil d’administration seraient ouvertes à tous les membres, élus ou non. Pas besoin d’un mandat pour réfléchir ensemble. Toutes les expériences sont bienvenues autour de la table. La seule différence, c’est que les élus acceptent de donner un peu plus de leur temps que les autres.
Notre expérience commune essentielle, c’est de savoir que le métier de scénariste de cinéma est d’une singularité absolue : chacun.e d’entre nous a sa manière, sa méthode, sa façon. Son talent. Chacun.e d’entre nous connait un chemin professionnel et artistique unique, avec ses tunnels, ses succès, ses surprises. Son destin. Nos personnalités, toutes différentes, sont notre force.
Le cinéma, qu’il s’agisse de fiction, de documentaire, de films expérimentaux ou d’animation, a besoin de scénaristes. C’est à dire besoin d’un temps où la pensée du film puisse se déplier en toute liberté. Un temps où la mise en scène puisse se chercher avant de se trouver. Un temps pour douter, pour se tromper, pour tracer le début du chemin. C’est grâce à ce temps incompressible, consacré au rêve, au désir, et à la confrontation avec le langage, que les films trouvent ensuite la force de se déployer à leur maximum.
Aujourd’hui, ce temps est menacé. Par le sous-financement désormais chronique de l’écriture des films, d’abord. Par la tendance de plus en plus lourde des producteurs à ne pas s’engager sur les scénarios en début d’écriture ensuite. Par la croyance aux « recettes » et autres lois des genres, enfin. Comme si les techniques pouvaient remplacer le travail. Comme si les exercices de style pouvaient remplacer le style.
Défendre les scénaristes de cinéma, pour moi, c’est défendre le cinéma comme expression artistique, comme expression d’une pensée, comme expression de singularités. C’est lutter contre l’uniformisation des œuvres. C’est lutter contre l’évacuation du risque dans le geste de mise en scène. L’indépendance et la diversité sont menacées, et nous, scénaristes de cinéma, qui sommes au tout début de la chaîne de fabrication, le sentons mieux que quiconque.
Cette année, le SCA a entrepris de rédiger un état des lieux de notre profession, un autoportrait de groupe en quelque sorte. Nous y racontons comment nous travaillons, comment nous avons du mal à travailler, comment nous avons du mal à vivre pendant que nous travaillons. Nous y racontons nos joies, et nos peines. Nos rêves. Nos cauchemars. De cet état des lieux sortira les grandes directions des prochains chantiers du SCA pour les années à venir.
Et parce que nous n’imaginons pas travailler sans dialoguer, nous partagerons notre réflexion avec tous ceux qui participent à la fabrication des films, et à ceux qui les regardent, dès l’automne 2018, lors des premières journées professionnelles consacrées au scénario de cinéma. D’ici là, nous avons besoin de forces et de confiance. L’aventure du SCA-scénaristes de cinéma associés n’en est qu’à ses prémisses. Si vous avez envie de la rejoindre, n’hésitez pas. Vous êtes les bienvenus.